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Ma vie romanesque

dimanche 8 mai 2011

Extrait

L'homme trébucha, jura, se massa le genou. Un coup d'oeil en arrière : ses deux compagnons suivaient toujours, leurs grandes capes plaquées au corps, les protégeant de l'air glacial de cette aube hivernale. Il tira son capuchon plus profondément devant son visage ; son souffle, court après cette rude montée, cristallisait devant son visage. Un coq lança une vibrante aria. L'homme se figea et leva une main qui immobilisa ses suivants. Pas un bruit, pas un mouvement ne répondirent au chant du volatile. Il reprit sa progression silencieuse jusqu’aux premières maisons. C’était un homme jeune, lippu, solidement bâti ; des éperons ajustés sur ses chaussures pointues trahissaient l'aristocrate. Son manteau vola dans la brise matinale, découvrant une taille épaisse, serrée dans une large ceinture de cuir de Cordoue. Il le rabattit d'un geste nerveux et écouta. A l’intérieur, c’étaient encore les visages pressés contre les oreillers, les chauds entassements de corps nus, les traits relâchés par le sommeil.
Il sembla hésiter. Devant lui, toutes les maisons se ressemblaient, avec leur toit de chaume descendant loin sur les façades, les haies protégeant les jardins, les portes de bois gonflées par l’humidité. A l’intérieur, elles étaient plus semblables encore : un foyer, un lit, un coffre, des pots, un peu de linge. Ses compagnons le rejoignirent et se postèrent de chaque côté du damoiseau, tels des gardes du corps. C'étaient un barbu au visage épais et un quasi adolescent à la peau grêlée. D'une main gantée, le jeune noble désigna une maison, à petite distance, et tous trois s’élancèrent dans une course silencieuse entre les haies des courtils. Nul, ni bête ni homme ne se manifesta. Ils franchirent le portillon d'une cour ; le glouglou d'une source se déversant dans un bassin couvrit le couinement du bois. Ils s'arrêtèrent devant une porte aux planches bien jointoyées passées au brou de noix. L'homme prit une large inspiration et, décidé, tourna la poignée. Rien ne se produisit. Le barbu vint à sa rescousse, secouant le mécanisme sans plus de succès. Le troisième contourna la maison au pas de course. Le damoiseau recula d'un pas et se jeta, épaule en avant, contre la porte récalcitrante. Elle grinça, ploya, mais ne céda pas. Alerté, un chien aboya, donnant le signal de départ d'un frénétique chœur de hurlements.

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